Le 9 avril 2025, la Commission nationale d’évaluation relative à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) a présenté son dernier rapport bisannuel revenant sur les données pour les années 2022 et 2023 [1] en Commission santé de la Chambre des représentants.

Que disent les chiffres belges relatifs à l’avortement depuis 2014 ? Le nombre d’IVG a-t-il augmenté ? Qu’en est-il de l’âge moyen auquel l’IVG est demandée ? Dans quels établissements l’avortement est-il le plus pratiqué ? Quelles sont les raisons les plus fréquemment évoquées ? Faisons le point sur l’évolution de ces données de 2014 à 2023.

Depuis 2014… le nombre d’IVG en Belgique est stable

En 2014, on comptait 19.107 IVG pratiquées en Belgique. En 2023, ce chiffre était de 19.686 IVG. Dès lors, on remarque que d’année en année, le nombre d’avortements reste donc stable.

Depuis 2014… l’âge moyen de l’avortement se situe autour de 29 ans

Beaucoup ont déjà entendu qu’IVG rime forcément avec immaturité et, par conséquent, avec jeunesse. Il est grand temps de déconstruire cette idée reçue [2]! Cette fausse idée sur l’IVG est d’ailleurs démontée par les chiffres : en 2023, c’était la tranche d’âges des 25-29 ans qui était la plus représentée avec 4.705 IVG pratiquées (environ 24% du nombre total d’IVG en Belgique). En 2014, il en était de même : c’était chez les 25-29 ans que les IVG était les plus pratiquées avec 4.713 avortements (environ 25% du nombre total d’IVG en Belgique).

Concernant l’âge moyen de l’IVG, en 2014 il était de 27,96 ans et en 2023 de 28,97 ans. Il y a donc une légère augmentation de l’âge moyen de l’IVG depuis 2014.

Le rapport de la Commission d’évaluation précise aussi « Les cas d’interruption de grossesse en dessous de 14 ans restent exceptionnels. Dès le prochain rapport, le secrétariat contactera systématiquement le médecin concerné chaque fois qu’un âge inférieur à 14 ans sera communiqué afin de vérifier qu’il ne s’agit pas d’une déclaration erronée (par exemple communication du nombre de semaines d’aménorrhée au lieu de l’âge de la femme) » [3].

Même si on améliore l’accès à la contraception, il y aura toujours des avortements.

En 2014, près de 15% des IVG étaient pratiquées en Belgique alors qu’une contraception était utilisée. En 2023, ce pourcentage était de 19%.

Depuis 2014… plus de 4 avortements sur 5 se pratiquent en milieu extrahospitalier

En 2023, 85% des IVG en Belgique, autrement dit 16.702, étaient pratiquées au sein des structures extrahospitalières. Il s’agit des Centres de Planning familial en Wallonie et à Bruxelles et des « abortus centra » en Flandre. En 2014, 81,6% des IVG étaient pratiquées dans les structures extrahospitalières soit 15.592 IVG. Ce pourcentage est donc relativement stable depuis 2014.

L’atout majeur de la prise en charge dans les structures extrahospitalières est l’accompagnement pluridisciplinaire de qualité centré sur la personne qui y est proposé (premier rendez-vous, intervention, suivi). L’intervention s’y déroule dans des conditions médicales optimales. Rappelons aussi qu’en centre extrahospitalier, pour les bénéficiaires en ordre de paiement de cotisations à la mutuelle, l’IVG est quasiment gratuite [4].

Depuis 2014… la raison la plus évoquée est celle d’un non souhait d’enfant au moment de la demande d’IVG

« Pas de souhait d’enfant pour le moment » : en 2023, 44% des IVG étaient demandées pour cette raison. De 2014 à 2023, la deuxième raison la plus évoquée par les femmes était celle d’une famille complète (12% des IVG en 2014 et 19% des IVG en 2023). Chaque personne enceinte a sa ou ses propres raison·s de demander une IVG et celle·s-ci doivent être respecté·e·s. Les professionnel·le·s des Centres de Planning familial accompagnent et écoutent les demandes des personnes souhaitant interrompre leur grossesse sans les juger.

Depuis 2014… environ 500 femmes se rendent chaque année aux Pays-Bas pour avorter

En Belgique, l’IVG peut être pratiquée jusqu’à 12 semaines de conception (14 semaines d’aménorrhée [5]). Une fois ce délai dépassé, la situation la plus fréquente est de renvoyer la femme vers les Pays-Bas où l’IVG peut être pratiquée jusqu’à 22 semaines de conception.

En 2014, 574 personnes enceintes ont dû se rendre aux Pays-Bas pour avorter. En 2023, elles étaient 417. Sans compter toutes celles qui, faute de moyens financiers, humains et/ou logistiques ne peuvent pas s’y rendre.

Depuis des dizaines d’années, Sofélia et la plateforme Abortion Right demandent à ce que la législation belge réponde aux besoins des personnes en demande d’avortement et des professionnel·le·s de terrain qui les encadrent. Nos revendications comprennent notamment l’allongement du délai légal à 18 semaines de conception.

Quelles revendications ?

En parallèle du traitement des chiffres, la Commission nationale d’évaluation relative à l’IVG a pour mission d’émettre des recommandations. Ces dernières sont au nombre de 38, toutes adoptées à l’unanimité [6]. Nous en citerons ici quelques-unes :

  • Développer un site internet gouvernemental spécifique, décliné sur les réseaux sociaux et régulièrement actualisé, sur l’accès à l’IVG et regroupant les informations utiles pour éclairer le choix des personnes confrontées à une grossesse non désirée (cadre juridique, procédure à suivre, liste des lieux accessibles pour une écoute ou pour pratiquer une interruption de grossesse…).
  • Octroyer la gratuité ou un meilleur remboursement par l’INAMI de tous les contraceptifs, y compris la contraception d’urgence sous toutes ses formes (pilule et DIU [7]) et la contraception de longue durée ainsi que des méthodes contraceptives à toutes les personnes en âge de procréer et quelle que soit l’affiliation à la mutuelle.
  • Etendre le délai de recours à l’avortement pour permettre à chaque personne d’interrompre sa grossesse dans une structure belge et ce faisant, éviter d’exacerber les inégalités d’accès à l’interruption de grossesse par la possibilité ou non de se rendre à l’étranger.
  • Supprimer l’obligation du délai d’attente légal de 6 jours entre la première consultation et le jour de l’interruption de grossesse. Dans la pratique, un délai d’attente peut être convenu entre l’équipe médico-psychosociale et la personne si celle-ci le juge nécessaire.
  • Organiser un module de formation à l’interruption de grossesse et à la contraception dans toutes les facultés de médecine et autres établissements d’enseignement supérieur formant des professionnel·le·s de la santé. La formation doit englober les aspects médicaux, juridiques, psychosociaux et éthiques des décisions liées à la santé reproductive.

[1] « Rapport bisannuel 2022-2023 », Site internet du SPF Santé Publique, Microsoft Word – Rapport bisannuel 2022-2023 (consulté le 16 avril 2025).

[2] Nous déconstruisions cette idée reçues et plusieurs autres dans notre campagne de sensibilisation de 2023 : IVG = Préjugés : déconstruisons les idées reçues qui entourent l’avortement !.

[3] Ibid.

[4] Pour plus d’informations sur la pratique de l’avortement au sein des Centres de Planning familial, rendez-vous sur www.jeveuxavorter.be.

[5] C’est-à-dire 14 semaines d’absence de règles.

[6] « Rapport bisannuel 2022-2023 », op. cit.

[7] Le DIU ou dispositif intra-utérin est une contraception d’urgence très efficace mais en Belgique, contrairement à ce qui se pratique déjà dans certaines villes du Royaume-Uni, elle est peu accessible. La contraception orale d’urgence est efficace avant l’ovulation mais n’agit plus une fois que l’ovulation a eu lieu.

Y aller

Pour davantage d’informations sur l’avortement, consultez notre dossier thématique « Avortement ».

Y aller