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A la veille du 28 septembre, journée mondiale pour le droit à l‘avortement, Sofélia (anciennement la FCPF-FPS) rappelle l’existence de sa campagne d’information et de sensibilisation 2023 intitulée « IVG = PRÉJUGÉS » portant sur les idées reçues entourant l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Des fiches informatives, une campagne dans les transports en commun bruxellois et des cinés-débats sont au programme de cette campagne.
De nos jours, l’avortement est un acte encore entouré de nombreux préjugés. « Finalement, l’avortement, n’est-il pas destiné aux personnes irresponsables ? Et puis, est-ce que c’est vraiment sans risque ? De toute façon, ça reste un meurtre et les gens qui avortent finissent toujours par le regretter, non ? » Eh non ! La réalité est bien loin du préjugé ! Malheureusement, ces idées reçues ont des impacts significatifs, notamment sur les législations qui régissent l’IVG. De plus, cette désinformation peut décourager, voire effrayer, les personnes qui souhaiteraient y avoir recours…
Pourquoi est-ce important de mener une telle campagne ? Parce que déconstruire ces idées reçues et fournir des informations fiables, dans le but d’améliorer les connaissances du grand public sur l’IVG sont des enjeux sociétaux et féministes importants pour tendre vers plus d’égalité entre les genres. Cela contribue à soutenir les personnes ayant un utérus dans l’appropriation de leur corps et de leur santé physique, sexuelle, reproductive et mentale.
Une partie des idées reçues sur l’avortement est encore basée sur des croyances du temps où l’IVG était encore illégale et donc dangereuse. Elles sont aussi fortement entretenues par les mouvements anti-choix [1] qui continuent d’exister comme le prouve encore la marche « pour la vie » qui a eu lieu à Bruxelles le 2 avril dernier [2].
Les lois sur l’avortement, ainsi que le processus d’adoption de celles-ci,participent aussi aux préjugés sur l’IVG. Le fait que l’avortement soit encore régi par un cadre pénal, participe à la mauvaise représentation qu’en ont le grand public, les praticien·ne·s, ou encore les personnes qui y ont recours. Il est donc important de déstigmatiser l’avortement en ayant un discours positif et non jugeant sur la thématique [3].
L’avortement, un droit encore et toujours menacé
Aujourd’hui encore, l’accès à l’avortement dans le monde n’est pas garanti à toutes et tous – comme on a pu le voir avec le renversement de l’arrêté Roe vs. Wade aux Etats-Unis en juin 2022. Depuis ce renversement, 25 Etats ont rendu l’accès à l’avortement très limité, voire l’ont totalement interdit ou ont tenté de le faire [4]. Sur le continent européen, de nouvelles lois restreignant l’accès à l’IVG ont été récemment adoptées. Parmi celles-ci on retrouve, en Hongrie par exemple, l’obligation d’écouter les battements de cœur du foetus pour toutes personnes souhaitant avoir recours à l’avortement [5]. L’IVG est un droit qui ne sera probablement jamais totalement acquis, c’est pour cela qu’il est primordial de rendre le sujet visible à tou·te·s les citoyen·ne·s.
Notons aussi qu’interdire l’avortement n’en diminuera jamais le nombre, mais le rendra clandestin et risqué pour la santé et la vie des personnes y ayant recours.
Au début des années 1970, la question de la légalisation de l’IVG se retrouve dans le débat public, à la suite du Manifeste des 343, le procès de Bobigny en France, et à l’affaire Willy Peers en Belgique. Le 17 janvier 1975, l’avortement est dépénalisé jusqu’à 10 semaine de conception en France avec la loi Veil [6]. En Belgique, il faudra attendre 15 ans de plus et une incapacité de régner du roi durant 48h, pour enfin voir émerger la loi Lallemand-Michielsens, le 3 avril 1990.
La loi belge de 1990 dépénalise partiellement l’avortement, autrement dit il est passible de sanctions pénales (amendes et emprisonnement) si les conditions strictes de la loi dans lesquelles il doit être pratiqué ne sont pas respectées [7].
Les mouvements féministes et les Centres de Planning familial ont été des acteurs importants dans la lutte pour cette dépénalisation partielle. Encore aujourd’hui, selon la loi du 15 octobre 2018, l’avortement n’est pas un droit en Belgique, il est juste dépénalisé et doit être pratiqué dans un certain cadre : l’IVG doit être réalisée avant la fin de la 12ème semaine de conception et un délai de six jours de réflexion doit être respecté entre la première consultation prévue et le jour de l’IVG. Si le cadre reprenant une série de conditions n’est pas respecté, la·le médecin et la personne ayant eu recours à l’IVG sont susceptibles d’être puni·e·s d’un emprisonnement et d’une amende. En Belgique en 2022, les personne ayant un appareil reproductif femelle n’ont pas droit entier de décision sur leur corps ni sur les fonctions reproductives de celui-ci. Parler d’avortement est donc un sujet sociétal et féministe primordial.
L’avortement, un enjeu essentiel dans la lutte pour l’égalité entre les genres
Rappelons qu’il faut un spermatozoïde et un ovocyte pour créer un embryon. De facto, cette thématique concerne bien l’ensemble de la population, et pas uniquement les personnes ayant un utérus. En effet, selon un sondage s’adressant au grand public réalisé par Sofélia dans le cadre de cette campagne [8], 65,6% des répondant·e·s affirment avoir déjà été confronté·e·s à une IVG, que ce soit personnellement ou dans leur entourage.
Par ailleurs, l’avortement est toujours stigmatisé socialement, ce qui représente un frein important à son accessibilité [9]. Le sujet demeure tabou, ce qui participe à sa méconnaissance et à la cristallisation des peurs et angoisses l’entourant. Réaliser une campagne de sensibilisation sur l’IVG participera à dédramatiser le sujet, sans pour autant le banaliser.
L’avortement est un sujet complexe car il touche à la maternité, aux représentations de la féminité et à la place des femmes dans la société. Le fait de pouvoir choisir ou non de devenir mère remet en cause toute une structure sociale. Une étude réalisée sur le sujet avance que l’avortement remet en question 3 éléments fondamentaux de la féminité : le fait que la sexualité des femmes est censée être uniquement vouée à la procréation ; l’inévitable destinée d’être mère ; et l’instinct maternel – à savoir le désir et la volonté de s’occuper des plus faibles [10]. Déconstruire les idées reçues autour de l’avortement est donc aussi une question de déconstruction des stéréotypes de genre.
Les objectifs de la campagne « IVG = Préjugés »
Le projet « IVG = PRÉJUGÉS » souhaite contribuer à déconstruire les idées reçues autour de l’avortement. Il s’adresse tant au grand public, qu’aux milieux associatifs et culturels en passant par les professionnel·le·s du secteur psycho-médico-social.
La campagne « IVG = PRÉJUGÉS » poursuit plusieurs objectifs, dont le fait d’·de :
- Améliorer les connaissances du grand public sur l’avortement, ses enjeux et les idées reçues qui y sont liées ;
- Déstigmatiser et dédramatiser l’avortement ;
- Pallier le manque d’accès à des informations et des supports de qualité, clairs, fiables et pratiques en Belgique francophone, en lien avec la déconstruction des idées reçues entourant l’avortement ;
- Libérer la parole sur l’avortement.
Les supports de la campagne « IVG = Préjugés »
Dans le cadre de sa campagne « IVG = PRÉJUGÉS », Sofélia – la Fédé militante des Centres de Planning familial solidaires a produit et diffusé plusieurs supports informatifs et pédagogiques, de juillet à octobre 2023.
5 fiches informatives
Diffusées cet été sur les réseaux sociaux et le site web de Sofélia, ces fiches informatives déconstruisent avec pédagogie les idées reçues les plus courantes quand on parle d’interruption volontaire de grossesse.
Pour les identifier, notre structure a lancé, en mars 2023, un sondage en ligne auprès du grand public et des travailleuses-eurs des Centres de Planning familial. Après analyses des réponses, nous avons retenu les 5 idées reçues suivantes :
- L’avortement rend stérile
- L’avortement comble un manque de contraception
- L’avortement est un meurtre
- L’avortement concerne surtout les jeunes
- L’avortement a des conséquences sur la santé mentale
Ces fiches informatives sont destinées tant au grand public, qu’au secteur psycho-médico-social. Elles sont disponibles en format PDF sur le site de Sofélia et également commandables en version papier auprès de Sofélia.
Première fiche : IVG = Stérilité
Cette première fiche info, qui est sortie le 10 juillet s’intitule « IVG =Stérilité ». Elle vise à déconstruire le mythe qu’une interruption volontaire de grossesse comporte de gros risques pour la fertilité de la personne qui a y recours. Pourquoi l’IVG ne rend pas stérile ?D’où vient ce préjugé ? Cette première fiche répond à toutes ces questions.
Deuxième fiche : IVG = Non-protégé
La deuxième fiche info « IVG = Non-protégé » vise à déconstruire l’idée reçue que l’avortement est utilisé à tort et à travers comme moyen de contraception de complaisance, par des personnes qui n’ont pas pris la peine de se protéger.
Saviez-vous que 56% des personnes ayant eu recours à un avortement au cours de l’année 2021 utilisait un moyen de contraception et sont malgré tout tombées enceintes [11] ? Comment expliquer ce chiffre ? Cette fiche aborde ces questions,tout en rappelant qu’aucun moyen de contraception n’est efficace à 100%, et que l’EVRAS (Education à la vie relationnelle, affective et sexuelle) a aussi un grand rôle préventif à jouer.
Troisième fiche : IVG = Jugé·e
La troisième fiche info « IVG = Jugé·e » qui a été publiée porte sur le préjugé plutôt répandu qu’un avortement est un meurtre. Elle permet également d’aborder la question de la partialité des délais, qui varient de pays en pays selon leurs tendances politiques. À travers la question du jugement, nous souhaitons mettre en lumière, qu’actuellement, c’est cette idée reçue qui détermine le cadre légal des IVG, et non les arguments scientifiques.
Quatrième fiche : IVG = Immaturité
Quand on parle d’avortement, nous avons souvent tendance à penser que les personnes qui souhaitent y avoir recours sont jeunes, célibataires ou en relation instable et sans emploi. La quatrième fiche info de la campagne, intitulée « IVG =Immaturité », décrypte l’origine de ce préjugé.
Ce document propose une analyse chiffrée des différents profils qui ont recours à l’IVG et déconstruit les préjugés, les uns après les autres. Ainsi, on y apprend l’âge moyen des patient·e·s, qui est de 29 ans ! On y apprend aussi que la majorité de ces personnes ont une situation stable et déjà des enfants !
Cinquième fiche : IVG = Déprimé·e
La cinquième fiche info « IVG = Déprimé·e » se penche sur une idée reçue qui veut qu’une IVG est forcément mal vécue par la personne qui décide d’y avoir recours et que c’est un acte dont on ne se remet jamais vraiment. Cette fiche rappelle qu’il n’y a pas de lien entre avortement et problème de santé mentale. Il peut, cependant, être mal vécu et ce, pour toute une série de raisons qui sont toutes valides. Parmi celles-ci, on peut retrouver les facteurs sociaux et économiques qui peuvent influencer la santé mentale des personnes avant, pendant et après une IVG. On notera également que la stigmatisation qui entoure cet acte peut aussi avoir un impact significatif.
Cette fiche insiste enfin sur l’importance de l’accompagnement psycho-social proposé par les Centre de Planning familial aux patient·e·s tout au long de cette démarche et sur la validité de tous les ressentis qui en découlent,tristesse comme soulagement.
Une campagne d’affichage dans l’espace public
Sofélia a lancé une campagne d’affichage dans l’espace public en Région Bruxelloise. L’objectif de cette campagne sera de toucher un large public issu de milieux sociaux, économiques et culturels variés n’ayant pas accès à Internet et aux moyens de communication actuels. Elle aura pour but la déconstruction des idées reçues qui reviennent le plus souvent quand on parle d’avortement.
La campagne en Région Bruxelloise aura lieu du 12 septembre au 9 octobre 2023 dans le réseau des transports en commun STIB. A noter que durant l’été 2023 s’est tenue une campagne d’affichage dans l’espace public wallon. Les affiches de cette campagne sont disponibles sur le site internet de Sofélia.
Des actions de terrain en Wallonie et à Bruxelles
Des actions de terrain portant sur la déconstruction des idées reçues sur l’avortement seront prochainement organisées par l’équipe de Sofélia en collaboration avec plusieurs partenaires dont certains des Centres de Planning familial affiliés dans différentes villes wallonnes et bruxelloises. Ces événement sauront lieu sous forme de ciné-débats.
Restez connecté·e·s ! Les dates et les lieux de ces soirées d’échanges seront communiqués prochainement sur les réseaux sociaux et le site internet de Sofélia : Facebook – Instagram – Site web
Qui sommes-nous ?
Sofélia – La Fédé militante des Centres de Planning familial solidaires (anciennement la Fédération des Centres de Planning familial des Femmes Prévoyantes Socialistes) a été fondée en 1984 par Soralia (anciennement les Femmes Prévoyantes Socialistes) afin de créer un contre pouvoir et une représentation spécifique et laïque dans le domaine de la contraception, de la parenté responsable, de l’interruption volontaire de grossesse et des relations affectives et sexuelles égalitaires.
Sofélia coordonne et promeut les actions de 20 structures actives en Wallonie et à Bruxelles : 17 Centres de Planning familial, dont 9 pratiquent l’interruption volontaire de grossesse (IVG), et 3 sièges. Elle a pour mission de représenter ses Centres de Planning familial auprès des pouvoirs publics. Elle est également le pouvoir organisateur de deux Centres de Planning familial dont elle prend en charge la gestion administrative et financière : le Centre de Planning familial Willy Peers à Namur et le Centre de Planning familial Soralia de Verviers.
Enfin, Sofélia fait partie intégrante du réseau associatif de Solidaris Wallonie avec laquelle elle partage des valeurs communes de solidarité, d’engagement, de proximité et de respect.
Sofélia réalise diverses actions et publications : campagnes, enquêtes, brochures, événements, portes ouvertes, etc.
Elle est reconnue par le décret du 17 juillet 2003 relatif au soutien de l’action associative dans le champ de l’Éducation permanente.
Dans le cadre de la création de sa campagne 2023, Sofélia a collaboré avec : le Centre de Planning familial Willy Peers, le Centre de Planning familial Soralia de Courcelles, le Centre de Planning familial de Namur – Réseau Solidaris, la Fédération Laïque de Centres de Planning Familial (FLCPF), la Fédération Prisme, et PIPSa (service de pédagogie interactive en promotion de la santé).
[1] Mouvement luttant activement contre le droit à l’avortement. Aussi appelé mouvement pro-vie.
[2] ANCIAUX Sylvain, « Qui se cache derrière « la marche pour la vie » qui a réuni 600 manifestants ce dimanche à Bruxelles ? », DH net, 04 avril 2023, https://www.dhnet.be/regions/bruxelles/2023/04/04/qui-se-cache-derriere-la-marche-pour-la-vie-qui-a-reuni-600-manifestants-ce-dimanche-a-bruxelles-ATUF72E2IVADHPR72RUSE2UAAU/ (Consulté le 25 septembre 2023).
[3] KUMAR, Anuradha et al., « Conceptualising abortion stigma », Culture, Health and sexuality, Vol 11, n°6,2009, pp. 625-639.
[4] New-York Times, « Tracking Abortion Bans Across The Country », 19 septembre 2023, https://www.nytimes.com/interactive/2022/us/abortion-laws-roe-v-wade.html (Consulté le 25 septembre 2023).
[5] M.G., « La Hongrie durcit sa loi sur l’avortement, les eurodéputés dénoncent une « autocratie électorale » »,TF1, 16 septembre 2022, https://www.tf1info.fr/international/la-hongrie-de-viktor-orban-durcit-sa-loi-sur-l-avortement-et-oblige-a-ecouter-le-coeur-du-foetus-les-eurodeputes-du-parlement-europeen-denoncent-un-regime-hybride-d-autocratie-electorale-2232487.html (Consulté le 25 septembre 2023).
[6] JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE, Loi n°75-17 du 17 janvier 1975 relative à l’interruption volontaire de grossesse, 18 janvier 1975, https://www2.assemblee-nationale.fr/static/evenements/anniversaire-loi-veil/loi%2075-17.pdf (Consulté le 25 septembre 2023).
[7] MONITEUR BELGE, Loi relative à l’interruption de grossesse, modifiant les articles 348, 350, 351 et 352 du Code pénal et abrogeant l’article 353 du même Code, 3 avril 1990.
[8] Sondage réalisé sur les réseaux sociaux de Sofélia (Facebook et Instagram) du 1er au 31 mars 2023 ayant récolté 256 réponses.
[9] KUMAR Anuradha et al., « Conceptualising abortion stigma », Op. Cit.
[10] Ibid.
[11] COMMISSION NATIONALE D’ÉVALUATION DE LA LOI RELATIVE À L’IVG, Rapport à l’intention du parlement,Février 2023, https://tinyurl.com/2acsbszw (Consulté le 25 septembre 2023).