En période de confinement au vu de la crise sanitaire du Covid-19 à laquelle le monde fait actuellement face, le revenge porn (« vengeance pornographique » en français) accroit de manière exponentielle. En quoi consiste ce phénomène ? Quelles conséquences sur la santé ? Pourquoi une telle augmentation ? Comment réagir ?
Revenge porn et comptes « fisha » : en quoi cela consiste ?
Le revenge porn est la divulgation publique d’un contenu sexuellement explicite sur internet sans le consentement de la·des personnes apparaissant sur ce contenu. Les contenus publiés sont souvent composés de photos, de selfies, de vidéos, etc. Ces contenus sont principalement diffusés sur les réseaux sociaux ou sur des sites pornographiques.
Les comptes dits « fisha » sont des comptes spécialement créés et dédiés à la diffusion de photos volées. En d’autres termes, il s’agit d’ « afficher » et d’identifier des filles considérées comme « faciles » ou plus rarement, des garçons infidèles ou homosexuels [1].
Tout le monde peut être concerné par ce phénomène (homme, femme, adolescent·e, adulte, etc.).
Dans quel but ?
L’objectif de l’auteur est, dans la majorité des cas, de se venger. Il s’agit souvent d’un ex-partenaire. Les contenus intimes ont, par exemple, été envoyés par la victime à sa·son partenaire au moment où ils étaient en couple. Mais, lors d’une rupture, un sentiment de haine et une envie de vengeance peut s’installer pour diverses raisons (mensonge, jalousie, tristesse, etc.).
Quelles conséquences sur la santé ?
Les victimes de revenge porn se sentent souvent coupables et honteuses et ce, surtout dans le cas où elles ont envoyé elles-mêmes ces contenus intimes. Parfois, ces photos/vidéos ont été réalisées à leur insu, sans leur consentement. Rappelons que les victimes ne sont aucunement responsables de la diffusion de ces contenus illicites. Les conséquences du revenge porn sont principalement d’ordre psychologique. Les victimes ont tendance à rester cloîtrées chez elles, à s’isoler et à se renfermer sur elles-mêmes. Il arrive que, les victimes envisagent le suicide ou passent à l’acte.
Pourquoi une telle augmentation du revenge porn et des comptes fishas en période de confinement ?
L’ennui est évoqué comme l’une des raisons principales de l’explosion du revenge porn et de la multiplication de comptes « fishas » durant le confinement. Une enquête publiée sur lemonde.fr précise « la plupart des comptes, majoritairement hébergés sur Snapchat, fonctionnent de la même manière, avec une publication tous les jours à 20 heures, avec des photos, le nom, le prénom, parfois le numéro de téléphone de la jeune fille. Parfois, ce sont des contenus qui ne sont pas des images de la victime, c’est une mise en scène ; mais ça peut aussi être du revenge porn, des clichés échangés dans le cadre d’une relation, et que le receveur diffuser à un tiers qui en fait une affiche » [2].
Comment réagir ?
Signaler le contenu
Des groupes informels se créent pour lutter contre ces comptes « fisha » en les signalant en temps réel. C’est notamment le cas sur les réseaux sociaux où des jeunes femmes s’allient pour signaler ces contenus illicites et pour soutenir les victimes. Les suppressions de comptes sont plus ou moins difficiles à obtenir selon les plateformes. Notons que certaines associations prennent aussi part au combat en signalant ces comptes. En France, c’est le cas d’e-Enfance [3].
Rappelons que les victimes ne sont aucunement responsables. Les auteurs sont les seuls responsables et peuvent être punis par la loi.
Déposer plainte
Il s’agit d’un délit. Une plainte peut donc être déposée. Peu nombreuses sont celles qui déposent plainte, d’une part, parce qu’elles ne savent pas qu’il s’agit d’un délit et, d’autre part, les victimes pour la plupart mineures se sentent honteuses, notamment vis-à-vis de leurs parents, et ne veulent pas en parler à un adulte.
Pour un dépôt de plainte, tournez-vous vers un commissariat de police. Si cela est possible, conserver les captures d’écran des contenus illicites peut être utile.
En Belgique, le 16 avril, la Chambre a adopté en séance plénière à l’unanimité une proposition de loi [4] visant à lutter plus efficacement contre le revenge porn [4]. Ce texte permet au tribunal de première instance d’ordonner en extrême urgence, c’est-à-dire dans les 6 heures, le retrait des contenus incriminés. Le diffuseur ou l’opérateur télécom aurait alors 6 heures pour retirer ou masquer les contenus. La victime pourra aussi s’adresser au Procureur du roi qui pourra ordonner le retrait des images. L’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes peut également introduire une action en justice avec l’accord de la victime. L’auteur risque une peine d’emprisonnement de six mois à cinq ans et une peine d’amende de 200 à 15.000 euros.
Se tourner vers une personne de confiance
En tant que victime, vous pouvez vous tourner vers votre entourage, vos ami·e·s, une personne de confiance ou encore des professionnel·le·s.
Les centres de planning familial sont à votre écoute par téléphone :
- Vous trouverez les numéros de téléphone des centres de planning familial des Soralia sur cette page.
- Vous trouverez les numéros de téléphone de tous les centres de planning familial à Bruxelles et en Wallonie sur loveattitude.be.
[1] LELOUP D. et FISCHER S., « Harcèlement sexuel : avec le confinement, le retour en force des comptes « fisha » sur les réseaux sociaux », lemonde.fr, 7 avril 2020, https://www.lemonde.fr/pixels/article/2020/04/07/harcelement-sexuel-avec-le-confinement-le-retour-en-force-des-comptes-fisha-sur-les-reseaux-sociaux_6035853_4408996.html (consulté le 16 avril 2020).
[2] LELOUP D. et FISCHER S., « Harcèlement sexuel : avec le confinement, le retour en force des comptes « fisha » sur les réseaux sociaux », Op. cit.
[3] FAUSTINE M., « Pourquoi le revenge porn fait des ravages pendant le confinement », madmoizelle.com, 15 avril 2020, https://www.madmoizelle.com/revenge-porn-confinement-1049597 (consulté le 16 avril 2020).
[4] BELGA, « La loi sur le « revenge porn » adoptée en plénière à la Chambre », rtbf.be, 16 avril 2020, https://www.rtbf.be/info/belgique/detail_la-loi-sur-le-revenge-porn-adoptee-en-pleniere-a-la-chambre?id=10483861 (consulté le 20 avril 2020).